“Faîtes attention à bien savoir jusqu’où vous allez trop loin” Cette proposition humoristique de Michel Audiard (grand scénariste/dialoguiste de renom des années 1950 à 1980, et également réalisateur entre 1968 et 1974) avait le don pour trouver des répliques percutantes pour les personnages de ses films. Aujourd’hui encore, tous ceux qui ont fait de l’improvisation un métier, dont ce fut mon cas pendant plusieurs années, se sont nourris et inspirés de grands esprits de la “répartie” comme le sien.
Ce genre d’état d’esprit, ce regard si singulier porté sur les choses de la vie, pour trouver LA réplique qui fera “mouche” au moment approprié, est une nécessité pour tous les professionnels d’aujourd’hui. C’est une gymnastique cérébrale à apprendre au début, à entretenir ensuite et qui fait toute la différence sur le terrain.
Quand on a appris à dégainer le bon esprit d’à propos afin de répliquer juste à chaque coup, jongler avec les mots est un jeu dont on ne peut plus se passer…
Au delà de Michel Audiard, il y a aussi comme source d’inspiration, Sigmund Freud qui appelait cela le “mot d’esprit”. Raymond Devos, qui se disait “manipulateur de la langue française”. Pierre Desproges qui se disait être “un artiste dégagé, humaniste, ayant du style et des lettres”. Edmond Rostand et sa “tirade des nez”. Philippe Lelièvre et Jamel Debouzze, qui sont aujourd’hui des références en matière d’improvisations théâtrales. A noter: Jamel Debouzze tente aujourd’hui de sensibiliser l’éducation nationale pour mettre le théâtre d’impros au programme des collégiens. Le but serait de permettre à ces jeunes, au delà d’une aisance verbale, d’acquérir une meilleure assurance et confiance en soi.
-L’improvisation théâtrale comme Art de la répartie-
Ou comment acquérir de l’aisance verbale!
Vous aussi vous rêvez de répliquer LA super phrase qui fait “mouche” à chaque coup?
Trouver la bonne répartie, mais 10 min après la remarque cinglante qui vous a littéralement crucifiée sur place…. ça marche moins bien! Cela nous est déjà arrivé à tous au moins une fois dans notre vie : “Mince, mais pourquoi je n’y pense que maintenant à cette phrase…” ; “Grrr! Il mériterait que je lui rabatte son caquet celui-là… Mais rien ne vient! Quoi lui répondre? Arg” etc, etc… Pestez-vous alors dans votre for intérieur! Alors vous ressassez, vous vous promettez que la prochaine fois vous saurez lui envoyer le bon uppercut verbal, le coup de grâce définitif tel Lagardère et sa redoutable “botte de Nevers”.
Seulement voilà, en attendant, votre frustration grandi autant que votre amertume envers ces ou cet interlocuteur(s), autant qu’envers vous-même. De manière récurrente, vous rêvez que vous trouvez la “punch line” définitive qui le mettra ou les mettront K.O ! Et inexorablement, en même temps que la sonnerie du réveil retenti, la dure réalité vous saute au visage!
Comment acquérir cette répartie alors?
Et si vous vous demandez “Mais comment avoir cette répartie spontanée, intelligente qui force le respect?” cet article est fait pour vous. Je vais vous donner, ici, quelques conseils pratiques qui devraient vous permettre de moins éprouver ces sensations désagréables de NÉANT TOTAL intérieur après certaines remarques pétrifiantes de vos interlocuteurs.
Des conseils pertinents pour soigner l’art et la manière de renvoyer la bonne répartie! Et que ce soit à un(e) ami, un(e) collègue, un(e) collaborateur-trice ou un(e) pair, ce sera pareil!
A vous le bon mot qui vous permettra de vous positionner sereinement ET concrètement…
Voici un extrait du film “Cyrano de Bergerac” de J-P Rappeneau en 1990 avec Gérard Depardieu – La tirade des nez : Ô merveille de répartie-
Alors concrètement c’est quoi l’improvisation théâtrale?
La répartie pertinente, c’est quelque chose qui se travaille, tout en restant accessible à tout un chacun. Certes, cela ne vous tombera pas du ciel tout cuit. Désolée! Avoir le sens de la répartie, comme tout apprentissage, demande une motivation au départ, de l’entrainement et de la mise en pratique qui vous donneront confiance, aisance et ASSURANCE! J’insisterai toutefois sur le fait qu‘il n’est jamais trop tard pour bien faire! Et qu’à n’importe quel moment, tout est possible… Surtout si vous commencez à vous entraîner de façon ludique et conviviale dans des ateliers ou des stages d’improvisations, présents actuellement dans toutes les villes et villages de France.
Je rejoindrais le grand Lao Tseu qui nous proposait : “Les tâches difficiles doivent débuter facilement. Les tâches grandioses doivent débuter petitement”.
Définition de ce qu’improviser veut dire:
Improviser (selon “l’art et la manière des us et coutumes” de l’improvisation théâtrale officielle) c’est une nouvelle manière de mettre son cerveau en action! L’improvisation théâtrale amène celui qui la pratique à penser autrement, à communiquer autrement, à écouter autrement, à observer autrement, et, de ce fait, à se positionner autrement que la plupart des individus.
L’art et la manière, c’est -à-dire?
A partir d’un “thème” et d’une “contrainte”, les improvisateurs, pro ou en herbes, doivent construire une histoire improvisée de 2 min 30 en moyenne, à 1, 2, 3 joueurs ou plus. Voilà la base de l’Improvisation Théâtrale. Mais il y a TOUT le travail d’entrainement en amont qu’on oublie trop souvent de citer! Eh oui, faire de l’impro ça se travaille, ça se prépare... Même pour les professionnels! Lors de ces entraînements réguliers, les improvisateurs vont s’exercer avec des techniques ludiques éprouvées à “déverrouiller leur zone de confort”. Débloquer du vocabulaire. Apprendre à réfléchir vite. Apprendre à écouter l’autre TOTALEMENT et sans condition. A observer pour mieux anticiper. Et aussi à découvrir, accepter et développer leur panel de personnages, en fonction de leur “univers” personnel, pour mettre tout cela au service de l’équipe et de l’improvisation.
Avoir le “sens de l’à propos” devient un automatisme dès lors que vous mettrez tout votre mental aux aguets. Cela devient alors “une seconde nature”.
Comment cet esprit d’a propos, amené par l’impro, peut vous servir dans votre quotidien?
Comment “ça” fonctionne?
L’idée est de ne pas se “fixer” sur soi, mais de se fixer sur l’autre! Et je partage totalement le point de vue d’Olivier Bettach sur le sujet : “si on regarde bien, dans “répartie” il y a “repartir”, donc je “prends” ce que me dit l’autre et je “repars” avec cette nouvelle matière, à laquelle j’ajoute ma contribution, et ainsi de suite “. C’est cette idée forte qui se travaille.
En général, les individus manquent de répartie, parce qu’ils ont peur de dire une bêtise. Alors, ils se freinent en permanence, et ils voudraient que, sur commande, au moment où ça les arrangerait, leur cerveau leur envoi la bonne réplique parfaite. Ils voudraient tout à coup lâcher les fauves… Mais les-dits fauves, à force d’être muselés sont en train de roupiller profondément au fond de la cage cérébrale.
N’oublions pas nos émotions, tout en lâchant prise!
Nos émotions nous protègent. Tout le monde s’est bien rendu compte qu’avec les mots, on pouvait faire de sacrés dégâts! Soit envers les autres ou soit envers soi-même. Alors, ces émotions pour nous protéger, anticipent le pire, grâce à notre cerveau reptilien dont le rôle est de nous protéger pour notre survie.
Ceux qui ont de la répartie sont capables d’inhiber ce “réflexe d’erreur” et de lâcher-prise (la base de toute désinhibition). Souvent travaillée, rarement innée, ils ont cette propension à se dire : “OK, j’ai tout dans ma tête, quelque part. Je me peux donc me projeter vers l’autre. Je ne sais pas encore comment ça va le faire, mais JE SAIS QUE CA VA LE FAIRE.. Quoi qu’il arrive, je sais que je vais retomber sur mes pattes verbales”. Et là, on rejoint cette dynamique de “seconde nature”.
Un extrait du film “Ridicule” de P. Leconte en 1996 avec Charles Berling – Epoque où les joutes verbales entre aristocrates étaient de mise à la cour de la reine
Conseils pratiques à tester dès… Maintenant! Go!
Premier conseil
La prochaine fois que vous serez en réunion, je vous suggère, en plus d’écouter les autres personnes présentes, de commencer à mettre votre cerveau en éveil autrement. Quand une question sera posée à un des membres de l’équipe, quelque soit le contexte, le sujet ou quelque soit votre rang hiérarchique ou celui de la personne interrogée, amusez-vous dans votre tête à répondre comme si c’était à vous à qui on posait la question. Cela stimulera la fluidité de vos idées, de vos pensées et votre débit intérieur de mots. Cela aura, de surcroît, à la longue, un effet positif sur votre confiance en vous. L’idéal serait de faire cet exercice régulièrement, jusqu’à ce que, systématiquement, vous ayez des idées qui viennent d’elles-mêmes, de préférence sans perdre le fil de ce qui se dit concrètement.
Parce que l’écoute est également fondamentale pour la répartie, je vous propose de comparer la réponse donnée avec celle que vous aviez imaginée. Comme tout nouvel apprentissage, au début cela va vous demander un effort, puis de moins en moins, puis plus du tout.
Pourquoi “ça” fonctionne?
Vous l’aurez compris! Le secret pour avoir de la répartie et “repartir” verbalement, c’est de se mettre dans l’action!
Parce que si vous continuez à écouter votre petite voix intérieure, qui vous dit : ” fais attention à ce que tu dis,hein! Ne blesse personne surtout, hein! Sois rapide! Te fais pas avoir! As-tu penser à te laver les mains avant de parler, etc…” bref, vous resterez pétrifié sur place, anxieux et frustré jusqu’à la fin des temps.
En revanche, si vous jouez le jeu de l’action, cette répartie se débloquera forcément. On le sait aujourd’hui :”Le corps suit l’intention”. Cela a été encore prouvé scientifiquement par la psychosociologue américaine Amy Cuddy. Si je me mets dans l’action, en réponse à quelqu’un, et que je commence une phrase, même si je ne sais pas ce que je vais dire, par exemple : “Ah ben oui, d’ailleurs…” ou encore “oui même que…” et que vous surenchérissiez sur les propos de votre interlocuteur, ça va le faire! Ce n’est pas magique, c’est physiologique! Quand je me mets dans l’action, donc, et que je commence une phrase, mon taux de testostérone augmente (même chez les femmes). Amy Cuddy a constaté ceci, récemment, à partir d’échantillon de salive qu’elle avait prélevé sur un public témoin. Pour faire court, la testostérone améliore le délai de la transmission synaptique. De ce fait, concrètement, on pense plus vite, on va plus vite, et on se retrouve avec des connexions neuronales similaires à celles en actions dans le rêve. Le rêve, ce moment d’imaginaire absolu où “tout est possible“!
Second conseil : se mettre dans l’action c’est là le secret!
Maintenant vous le savez! L’action donne donc accès à ce pouvoir là! Et un humain averti en vaut deux… Et avoir de la répartie pour 2, c’est plutôt bien, non? Si vous ajoutez à cela une belle écoute sereine, votre rapport à la répartie va s’améliorer ++!
Une analyse dans le calme et un mental d’acier, comme ont appris à le faire les sportifs et les comédiens professionnels… Ça vous dit comme objectif ?
Une bonne répartie… C’est finalement à la portée de tous! Quand on utilise les bonnes techniques pour cela!
Si vous voulez allez plus loin rapidement, je vous accueillerai avec joie lors d’un de mes prochains stages de théâtre d’improvisations,
Merci d’avoir lu jusque là 🙂
A Noter: Sur la photo “à la une” de cet article, par ordre d’apparition de gauche à droite, en situation d’improvisation en public, François, Julien, et Serge (au fond) des “TrouBaDingues“: Troupe d’improvisations que j’ai créée et entraînée de 1995 à 2012, et ai formé en son sein, de nombreux improvisateurs-trices formidables voire exceptionnel(le)s.
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Bonjour
Je suis très intéressée parla repartir
Puis je recevoir vos infos
Merci beaucoup
Bonjour à vous Chantal,
Merci pour votre retour.
Parlons-en !
Je vous contacte par mail afin que nous en discutions.
Au plaisir !